"Deuils et transformations"
Chaque fois que nous perdons quelqu'un, quelque chose, des repères, quelque chose se modifie dans l'énergie et nous vivons un deuil.
Or notre société a ramené les rites autour des deuils au strict minimum. Plus de rites de passages pour marquer une étape, plus ou peu de célébrations en dehors des enterrements.
Comment vivre une transformation si nous n'avons pas d'espace pour le deuil?
Chaque transformation contient son passage où tout est remis en question, tout est remis à 0.
Pour le vivre au mieux, il faut accepter de déposer les armures, masques, accessoires, superflus....
D'ailleurs, quand on perd une personne proche, il n'y a même aucun mot qui peut décrire, légitimer, apaiser la souffrance de la perte.
Le deuil est un espace avec peu de mots: bien sûr, on peut décrire ce que l'on ressent à ce moment, la dissolution de Soi, la fragilité des certitudes, le corps qui flanche... mais aucun mot ne peut rendre compte de la profondeur de ce processus.
Celui-ci peut se vivre avec douleur, ou avec détachement: nous pouvons être surpris de l'intensité d'une émotion ou au contraire de l'absence d'une émotion.
Si on s'attache seulement à son aspect énergétique, cette étape qui mène à la transformation est un creuset alchimique où chaque élément est passé au crible et déposé devant la porte: on ne garde que l'essentiel pour aller au-delà.
Je te parle là du processus des vivants.
Chaque étape, idéalement, chaque transformation pourrait être vécue avec conscience, en se donnant le temps nécessaire aux intégrations pour avancer dans la vie avec moins de lourdeurs...
Et à chaque fois, on traverserait le moment où "on ne sait pas".
Ce moment où on sent que quelque chose est à l'oeuvre et qu'on ne peut rien faire d'autres que d'accepter cette mise à 0.
Concrètement, si tu traverses un deuil, réel ou fictif, tu vas peut-être observer que ton mental t'emmène dans des boucles qui amènent pleurs, non-acceptation, boucles de culpabilité, anxiété... Chaque fois que tu suis les pensées, une émotion se déclenche.
Physiquement, tu peux expérimenter des boules au ventre, gorge serrée, poitrine lourde, intensité difficile à supporter qui peuvent te mener à marcher, ranger, bavarder, te jeter dans le travail, grignoter, boire, céder à une addiction...
Tous ces mouvements dans le corps sont révélateurs d'une intensité portée dans ton corps depuis longtemps.
Les deuils et les chocs émotionnels ne font que réactiver l'intensité, mais en général, ils n'en sont pas la cause.
Pour laisser le processus de transformation se faire tu peux:
Respirer avec les intensités émotionnelles ( et c'est super courageux, difficile parfois et on peut avoir besoin de soutien pour ça) et ce, chaque fois que nécessaire: ça peut être plusieurs fois par jour dans les grandes occasions!
Observer tes pensées, et pourquoi pas les noter quand elles sont récurrentes ( et utiliser diverses approches: personnellement, j'ai bien celle de Byron Katie)
Observer l'énergie que tu as mise dans la relation avec ton proche, ou avec la situation avant qu'un évènement mette fin à ce à quoi tu étais habituée: cette fin est l'opportunité de redéfinir de nouveaux paramètres, de nouveaux choix, et cette énergie avec ton proche peut être investie dans un nouveau "toi": qui es-tu si tu n'es plus la fille de, la femme de, la mère de?
Nous cristallisons tous un rôle dans les relations ( ou les situations) : quand la situation s'arrête, nous pouvons relâcher le rôle, et ressentir le lien d'âme à âme sans se référer au rôle joué....
Le plus difficile est de se tenir dans l'entre-deux, sans se presser, sans forcer, avec la confiance que le mouvement de la Vie finit toujours par se relancer.
Parfois, nous l'ignorons, s'il y a un bénéfice caché dans le fait de se tenir entre parenthèses.
Le but n'est pas d'être entre parenthèses, mais de se laisser transformer dans le creuset alchimique pour devenir cette nouvelle version de nous qui émerge: la rencontrer, l'adopter, jouer avec elle jusqu'à la prochaine facette/ émanation de notre personnalité et de notre être.
Et d'agir en étant cette nouvelle facette: en général, on n'a aucune idée de ce qui a changé, évolué et on le découvre en faisant, en avançant, en marchant: on est parfois étonné, et même dépité de voir qu'auparavant, on aurait réagi de telle ou telle manière et que maintenant, ce n'est plus possible. La nouvelle émanation ne réagit pas comme avant.
C'est comme si une porte fréquemment empruntée était maintenant condamnée, et qu'il fallait trouver un nouveau passage...
Pourquoi je te parle de ça maintenant?
Parce que je sens une énergie de reset à l'oeuvre, très puissante et que je vois qu'elle reprogramme certains aspects de nos personnalités, elle nous fait abandonner des croyances et que pour certaines personnes, cela se vit avec autant de vulnérabilité qu'un escargot sans sa coquille.
ça donne " si je ne croit plus à ça, alors à quoi je vais croire? "
A rien. En toi. En la Vie. En quelque chose sans nom...
Et cette perspective non étiquettable peut être intolérable, au point qu'on a envie de se précipiter sur n'importe quelle histoire qui parait avoir un sens.
Alors tu vas chercher autour de toi, et sans doute, on va te parler de l'Univers qui veut quelque chose pour toi, on va te parler d'un plan, on va te parler de prédictions ( et si ça se trouve tout est vrai, mais le soucis n'est pas là..) .
Le problème est que si une part de toi a besoin qu'on lui raconte une histoire, elle va la trouver. Elle va adhérer à la vision de quelqu'un d'autre au lieu de te laisser reconstruire, re-pixelliser le nouveau " Toi", en partant de l'intérieur.
A ce moment- charnière, tu vas repartir dans une boucle où cette fois encore tu ne feras pas l'expérience de ta souveraineté.
C'est ni bien ni mal , c'est juste une nouvelle boucle d'expérience qui une fois vécue te laissera sans doute une nouvelle opportunité de te faire confiance suffisamment pour te laisser accueillir ton émanation, à ta façon.
Parfois ces boucles sont douloureuses: il y a beaucoup de personnes qui actuellement racontent des histoires qui ressemblent à du sable d'or, et qui , une fois le moment passé, n'est plus que sable terne entre tes doigts, laissant une effluve d'amertume...
Je t'invite donc à observer ce qu'il se passe en toi quand tu vis un entre-deux . ( vois l'agitation, la peur, la tristesse, etc...)
Et puis de renoncer à l'interprétation que tu as un problème parce que tu ne sais plus où tu vas, ni comment.
Puis apprendre à rester dans cette entre-deux, un peu plus longtemps à chaque fois ( les premières fois, on peut avoir envie/ besoin de ne pas être seul à cet endroit: alors on va tester des choses, et puis on sera ramené, encore et encore à ce portail. C'est ok. Un jour, nous pourrons y aller seul, en toute maturité et en pleine conscience de notre êtreté. )
Tu fais un travail sacré, quand tu te tiens là, à accueillir et respirer avec malgré tes doutes, malgré tes peurs...
et c'est ce travail qui peu à peu dépassionne les croyances, épure le regard.
C'est dans ce creuset que naît une confiance subtile, une foi dans le mouvement de la Vie, avec ses hauts et ses bas...
C'est là aussi que naît une conviction intime qui te guide, à ta grande surprise, vers des endroits insoupçonnés.
Tu deviens l'aventurièr.e qui vit pleinement, qui expérimente, qui habite son espace intérieur et se laisse transformer par la Vie.